Visions d'impacts #4 - Armelle DION
- luciemauzet
- 2 sept.
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Dernière mise à jour : 9 sept.
Sur le site académique Lyon Saint-Étienne, l’impact des projets issus de la recherche est un axe structurant et stratégique de l’innovation. Dans le cadre du PUI IMPULSE, une démarche collective est engagée pour construire une méthodologie adaptée, capable d’accompagner les chercheuses et chercheurs dans l’analyse et la valorisation de l’impact de leurs projets innovants.
Aujourd'hui, la parole est à Armelle Dion, Directrice de l'innovation aux Hospices Civils de Lyon - HCL. Elle partage son point de vue et son retour d’expérience sur les conditions nécessaires pour faire de l’impact un levier concret au service de l’innovation.

Penser l’impact au-delà des indicateurs classiques
Pour Armelle Dion, l’innovation s'ancre dans une dynamique de terrain. Elle ne se limite pas aux résultats issus de la recherche académique : elle émerge aussi des pratiques, portée par des équipes de santé engagées dans l’amélioration des organisations et des parcours de soin.
Dans cette perspective, la notion d’impact est centrale pour qualifier la valeur créée par ces innovations, en particulier dans le champ organisationnel. Les outils traditionnels comme les brevets ou la création de startups sont pertinents, mais ne suffisent pas à rendre compte des transformations à l’œuvre. Le PUI est ainsi perçu comme un cadre pertinent pour structurer une approche plus ouverte, intégrant les dimensions sociales, éthiques, managériales et sanitaires.
Vers une approche élargie et structurée de l’impact
L’impact, tel que défendu par Armelle Dion, recouvre une pluralité de dimensions : transformation des pratiques professionnelles, de l'évolution des organisations, du pouvoir d’agir accru des professionnel(le)s, des patient(e)s et de leurs aidant(e)s, mais aussi des effets sociaux et politiques.
"Il y a une prise de conscience qu'on ne fait pas que générer de l'emploi et du chiffre d'affaires, mais qu'on modifie un système quand on innove (...) Il faut s'éloigner de la vision d'un impact purement économique et intégrer aussi l'aspect social, politique, digital, de santé etc. "
Elle plaide pour une méthodologie "reconnue" permettant de systématiquement poser les bonnes questions en amont, même lorsque les réponses ne sont pas immédiates : quels effets sociaux, éthiques et politiques, cette innovation va-t-elle produire ? Cette grille de lecture induit un changement de posture, en donnant plus d'impact aux patients, patientes et à leurs aidants et aidantes, en général insuffisamment et/ou trop tardivement mobilisés dans les projets technologiques.
Faire de l’évaluation de l'impact un outil partagé au sein des HCL
À l'échelle des Hospices Civils de Lyon, la direction de l’innovation, créée il y a quatre ans, développe une démarche d’évaluation de l’impact à plusieurs niveaux : celui des projets accompagnés et celui du dispositif global. Concrètement, cette approche s'est illustrée à travers le développement d'une méthodologie propre aux HCL : la priorité n'est pas donnée à la maximisation des sorties dites "classiques" (licences, startups) mais axée sur le développement du potentiel humain et organisationnel (des indicateurs dédiés sont en cours de construction).
Ainsi, la structuration de l’évaluation d’impact progresse, mais elle représente encore un défi à relever. Dans un contexte de ressources limitées, la capacité à démontrer la valeur ajoutée des actions devient un enjeu stratégique. L’évaluation s’impose ainsi comme un levier essentiel pour sécuriser et pérenniser les dispositifs d’accompagnement.
Si la direction générale accorde une attention centrale à la question de l’impact, la diffusion de cette culture au sein de l’établissement reste hétérogène. La diversité des profils parmi les 24 000 agent(e)s rend difficile une appropriation homogène des méthodes d’évaluation.
Comme le souligne Asma Fares, médecin de santé publique qui collabore activement avec la direction de l’innovation des HCL, l’intérêt est bien présent, mais la maîtrise des outils reste encore partielle. Remplir un tableau d’indicateurs peut être perçu comme un exercice abstrait ou technique : d’où l’importance d’adopter une posture d’appui et de facilitation, plutôt qu’une logique de contrôle.
Se coordonner pour pérenniser les différents dispositifs
Armelle Dion souligne l’intérêt croissant porté à l’évaluation de l’impact au sein des établissements, mais constate une diversité de pratiques à harmoniser pour faire émerger d’un cadre commun. À ses yeux, cette démarche collective est d'autant plus importante que l'absence actuelle de coordination freine la consolidation de démarches robustes à l’échelle du site Lyon Saint-Étienne.
« Tout le monde se pose les mêmes questions (...) ma crainte, c’est qu’on ait tous des façons très différentes de mesurer cet impact. »
Elle invite à s’inspirer des démarches d’harmonisation déjà éprouvées dans d’autres champs, comme la qualité ou la gestion des risques en santé, pour envisager la co-construction d’un socle d’indicateurs ou de référentiels partagés. Dans un contexte budgétaire contraint, elle rappelle que l’évaluation constitue un levier de légitimation et de pérennisation des dispositifs, et qu’elle mérite à ce titre une place plus affirmée dans les stratégies d’accompagnement de l’innovation.
Faire de la diffusion un moteur d’impact
Pour Armelle Dion, l’amplification de l’impact passe par une stratégie structurée de diffusion. Il ne suffit plus seulement d’expérimenter : il faut organiser, coordonner, et anticiper les effets de l’essaimage à plus large échelle. Dans cette perspective, elle voit le cadre du PUI IMPULSE comme une véritable opportunité de soutien d'une diffusion d’innovations à fort impact, à une échelle multi territoriale et dans une logique d’ingénierie du changement.
« Qui dit impact, dit diffusion de l’innovation à large échelle. Il ne suffit pas d’expérimenter une méthodologie de mesure d’impact localement, il faut se placer le plus tôt possible dans une posture de diffusion du dispositif à large échelle. Il faut absolument éviter une duplication à l’identique de dispositifs élaborés spécifiquement pour des cas, et donc difficiles à généraliser. En somme, les copier-coller mal maîtrisés. »
Des évolutions des dispositifs d'accompagnement à la mesure d'impact seraient également profitables aux innovations des innovations organisationnelles ou des parcours de santé. Sur ces thématiques, les outils de transfert sont encore peu formalisés, souvent limités à une logique de mise sur le marché.
De manière plus générale, la coordination inter-PUI et régionale est perçue comme un levier réellement stratégique. Les innovations en santé sont souvent fédératrices, et des projets d'évolutions organisationnelles peuvent également cacher des opportunités d'innovation technologiques (dont la télémédecine par exemple). L'objectif est donc double : amplifier la diffusion des innovations à fort impact sociétal, c’est aussi contribuer activement à leur pérennisation et à leur viabilité économique.
Ce travail de réflexion collective sur l'impact a été réalisé avec l'expertise de SoScience.
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